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Par Benjamin Lacroix
Personnage incontournable du paysage mégevan, Oscar est une histoire à lui tout seul. Quand il ne vous en raconte pas pour vous shooter en mode VIP, il lui arrive parfois de s’épancher sur la sienne, magnifique. Portrait.
Look à la Robocop, barbe poivre et sel ciselée, peau mate, Oscar ne laisse personne indifférent. « Le filmeur, c’est d’abord un acteur », concède-t-il. Il lui arrive parfois d’ajouter le maquillage au déguisement, quand ce n’est pas la cape « à la Batman. » Identifiable entre mille, il est la coqueluche des enfants qu’il shoote au pied des pistes ou dans le village. Cette originalité peut paraître excessive. Elle masque un parcours d’homme singulier. Né en Anatolie turque il y a 45 ans, le prénommé Ozkan est encore bien loin des visons du Mont d’Arbois quand il lui faut parcourir, quotidiennement et à pied, les 10 kilomètres aller-retour qui le séparent son école. Il découvre la photographie quand son père achète le premier appareil télémétrique de la famille. « Les clics, le bruit, ouvrir le boitier, détailler la mécanique, j’adorais ça », confie-t-il. En 1989, alors étudiant, il quitte la Turquie à 23 ans pour rejoindre sa famille installée désormais à Paris dans le sillage professionnel du paternel. « Je suis venu avec des rêves en France, j’ai découvert la réalité », reconnait-il. L’homme vivote de petits boulots en petits boulots, notamment dans la confection. A la fin des années 90, il répond à une annonce de l’agence Incognito qui cherche des filmeurs pour l’été à l’Ile de Ré et Saint-Martin. « Au départ, je pensais qu’ils cherchaient des cameramen, j’étais imbattable, formé sur la bétacam familiale Hitachi », se marre-t-il. Philippe Stanislas, le patron de l’agence, est prêt à lui laisser sa chance mais bute sur le français approximatif de son interlocuteur. « Je lui ai dit que le sourire était international » La formule fait mouche. C’est d’ailleurs à Saint-Martin qu’il trouvera son nom de scène. « Les enfants avait du mal avec Ozkan et m’appelaient plutôt Oscar. » Suivent des passages à Sainte-Maxime, Tignes, avant de poser ses objectifs à Megève en 2007.
Volubile, extraverti, voire exubérant
Une histoire d’amour contrariée avec la station, puisqu’Oscar avant déjà tenté l’aventure près de dix ans auparavant. Sans succès. S’il ne le confesse pas, le sentiment de revanche est un moteur qu’Oscar a su dompter pour le transformer en une énergie follement positive. Après 3 ans de pratique en solo à Megève, il est aujourd’hui à la tête d’une petite entreprise de deux photographes, une vendeuse et une laborantine. Oscar a pignon sur rue. Sa boutique ne désemplit pas, même s’il estime que le marché mégevan est saturé. « Il y a trop de photographes filmeurs à Megève. A l’époque, on pouvait gagner 4 000 euros par mois, nous sommes en dessous des 3000 euros aujourd’hui », juge-t-il. Certains mercenaires n’hésitent pas « à taper de la gueule pour faire du chiffre », renvoyant une impression d’agressivité. D’autres ont cédé aux tentations inhérentes à ce métier. « J’en ai vu plonger dans la drogue, l’alcool et le sexe. Quand vous passez le soir d’établissement en établissement, si vous prenez un verre à chaque fois, vous êtes mort. » Loin des chausse-trappes de la nuit, Oscar conduit sa vie autour des principes enseignés par sa pratique des arts martiaux, notamment le taekwondo, et le soufisme. Volubile, extraverti, voire exubérant, la nature d’Oscar est aux antipodes de son personnage. « Mon combat, c’est de réussir par moi-même », confesse-t-il avec la flamboyance typique du self-made-man. Des valeurs qu’il veut partager avec celle qu’il épousera cet été. « Je vais me marier à Paris », nous confie-t-il ému. Mais le job n’est jamais très loin. « Je ne sais pas si la cérémonie va se dérouler avant ou après ma saison d’été à St-Tropez. » Reste une question en suspens : qui réalisera les photos de la fête ? « Même si je suis un filmeur tout terrain, ce soir-là, je poserai le boitier », promet-il.
Bravo qu’elle parcourt