Par Morgan Couturier
Annoncée par le président de la République puis confirmée ce jeudi 26 novembre 2020 par Jean Castex, la fermeture des remontées mécaniques durant les vacances de Noël, vient amputer les stations de ski de leur principale activité. Malgré quelques ajustements et l’élargissement des randonnées, les acteurs concernés ne décolèrent pas.
« Il me semble impossible d’envisager une ouverture pour les fêtes ». Depuis mardi, ces quelques mots du chef de l’Etat tournent en boucle au sommet de nos montagnes. Un cauchemar que peinent à éliminer les acteurs impliqués, comme si se réveiller devenait aussi brutal que ces paroles. Dans un univers où la moindre déflagration fait naître une avalanche, de tels propos n’ont pas tardé à créer un déluge de critiques.
Un écœurement sans précédent, d’autant que les signaux envoyés par le gouvernement à l’issue des différentes concertations laissaient entrevoir un avenir plus positif, comme l’explique la maire de Megève Catherine Jullien-Brèches dans les colonnes de Megève People. Le discours finalement contraire aux attentes, Emmanuel Macron et son gouvernement descendent aujourd’hui une piste noire de haine.
« Il est difficile de comprendre comment fonctionne ce gouvernement. Tous les acteurs de la montagne ont été plus que jamais soudés et responsables afin d’appréhender cette saison d’hiver dans la plus stricte sécurité sanitaire et nous avions fait admettre à Matignon l’idée d’attendre encore 10 à 15 jours pour une prise de décision plus en phase avec l’évolution de l’épidémie », renchérit Eric Brèche, président du Syndicat National des Moniteurs du Ski Français, dont l’exaspération est renforcée par de nouvelles incohérences.
17 000 moniteurs de ski indépendants mis de côté
Les activités de plein air étant autorisées dès ce samedi en ce qui concerne le périscolaire, le syndicat peine à comprendre comment la montagne et le ski ne peuvent se joindre à ces activités. « On va permettre aux gens de se déplacer, peut-être dans des endroits où il y aura bien plus de risques de contamination qu’en montagne. Et on va laisser nos amis suisses et autrichiens, le plaisir de recevoir des clients », glisse de son côté Alexandre Maulin, dans les colonnes du Dauphiné Libéré.
Les spatules laissées au placard, au même titre que les 17 000 moniteurs de l’Ecole de Ski Française, voilà toute une économie qui fond sous la… froideur des propos du président de la République. « Ça sentait le sapin, mais après la réunion et l’annonce d’un délai dix jours qui nous a été faite, c’est une décision surprenante, hâtive alors que les stations dans leur ensemble ont tout fait pour aboutir à un protocole qui assure la sécurité des visiteurs dans toutes les étapes du parcours client. J’ai un grand sentiment d’amertume. Après ce qui nous a été annoncé, on a l’impression de s’être fait avoir », poursuit le président de Domaines Skiables de France (DSF).
Même son de cloche du côté de la Compagnie du Mont-Blanc, où l’exploitant des stations de Chamonix et de Megève se retrouve à l’arrêt, alors que ses remontées mécaniques relèvent des transports publics, au même titre que les trains de la SNCF ou les RER, pourtant autorisés à reprendre une activité plus ou moins normale dès le 15 décembre. « Cet été sur tous nos appareils, on a accueilli 2,3 millions de passages avec des volumes de clientèles de cet ordre sans un souci, sans un cluster. Vu les conséquences économiques, est-ce que cela mérite vraiment une fermeture des stations ? C’est tellement lourd de conséquence », s’indigne le PDG Mathieu Dechavanne, toujours dans les colonnes du Dauphiné.
Au gré des restructurations, les stations s’appuient de plus en plus sur un modèle « 4 saisons »
« On est extrêmement surpris, c’est un scénario que l’on avait certes envisagé, mais qui semblait s’éloigner ces derniers jours, explique pour sa part Frédéric Porte, directeur général de Tignes Développement au journal Le Figaro. On s’attendait à avoir des précisions sur les conditions d’ouverture, mais pas à une fermeture définitive ».
Désormais, alors que certains plongent dans le désarroi, à l’instar de Chantal Carlioz, la présidente d’Isère attractivité, d’autres préfèrent tourner la page, et trouver du positif où il est encore possible d’en trouver, à savoir dans la possibilité d’organiser des randonnées pédestres ou de ski nordique, ou de profiter à nouveau des équipements annexes, tels que les thermes et les espaces culturels. Le tout, en espérant une rapide réouverture en janvier.
« À Saint-Gervais, nous avons un panel important d’autres activités. Il y a 50% des gens qui viennent à Saint-Gervais l’hiver et qui ne skient pas ! », dixit Didier Josephe, directeur de Saint-Gervais Mont-Blanc Tourisme, rapidement suivi par son confrère de Tignes, Frédéric Porte. « On a une saison assez longue, notamment grâce au glacier qui nous permet de prolonger les activités jusqu’au printemps. On va concentrer nos efforts pour rattraper le temps perdu à ce moment-là », complète-t ’il.
En Suisse, skier est possible depuis… novembre
Alors quitte à perdre de l’argent et du temps, autant mettre à profit celui-ci pour peaufiner les derniers réglages de la reprise. « Le gouvernement doit faire confiance aux professionnels de la montagne ! Tour de cou anti-Covid, espacement dans les files d’attentes, désinfection du matériel loué et des zones de contact, gel hydroalcoolique à disposition, les stations sont aux petits soins pour accueillir leurs touristes ! », propose ainsi Alexis Jolly, délégué départemental de l’Isère.
Enfin, et puisque les nuits sombres s’annoncent encore nombreuses, le monde du ski peut au moins espérer une lueur d’espoir dans l’observation de ses voisins autrichiens et suisses, là même où certaines pistes ont déjà été ouvertes lors des week-ends de novembre. En effet, selon nos confrères de France Bleu, le pays du chocolat teste actuellement le ski en période de Covid, en s’appuyant sur le fameux « protocole sanitaire strict », cher à Emmanuel Macron. Bilan ? Les retours sont globalement positifs, le plaisir de la montagne l’emportant sur les contraintes. La neige est donc plus blanche ailleurs, mais au risque d’exaspérer les stations, le gouvernement serait bien vu de suivre ce modèle.
> Plusieurs pétitions sont en ligne pour obtenir l’ouverture des stations
Mes opinions – Pétition initiée par Robin Lecureuil > cliquez ici
Change.org – Pétition initiée par Nicolas Véjux > cliquez ci